Le durcissement de la politique de l’AP-HP remonte à décembre 2023, quand a été diffusé un nouveau « guide de laïcité » qui indique que « le port d’une charlotte de bloc opératoire, en dehors des situations dans lesquelles elle est requise pour les besoins du service, peut constituer l’expression d’une appartenance religieuse et, ainsi, un comportement professionnel fautif ».
Blandine Chauvel, élue du personnel Sud Santé, raconte elle aussi une « chasse aux bonnets, aux bouts de tissu ». « De plus en plus de cas nous remontent, explique-t-elle. Des collègues s’en vont sans bruit, l’enlèvent à contre-cœur, certaines mettent une perruque. Ils semblent viser les personnes selon leur origine ou leur religion supposées. Pourtant, des collègues portent un bonnet pour cacher une alopécie, d’autres, d’origine africaine, mettent des turbans pour des raisons culturelles. »
Ce strict respect des règles, tout à coup, lui paraît à géométrie variable. « J’ai toujours travaillé beaucoup plus que le temps réglementaire. Ça n’a jamais posé de problèmes à personne. » Elle raconte aussi que certaines fêtes religieuses chrétiennes font partie de la vie des services : « À Noël, il y a des sapins, on mange une bûche, des chocolats. La galette des rois est systématique. »
Comme Majdouline, Myriam ira jusqu’au bout : « S’ils m’excluent, ils auront perdu une chirurgienne. Je trouverai du travail ailleurs. Avant, je voulais travailler pour l’hôpital public. »
L’infirmière finit par être renvoyée, pour deux motifs : « Port d’une tenue vestimentaire inadaptée, un couvre-chef, et refus réitérés de l’ôter malgré les demandes. » La laïcité, pourtant invoquée au départ comme raison des griefs à son endroit, a complètement disparu des justifications.
Le médecin critique vertement la débauche de moyens déployés par l’administration pour aller jusqu’au renvoi de soignantes compétentes : « L’AP-HP peine à retrouver son niveau d’infirmières de 2019 avant le covid… Quelle perte de temps et d’énergie ! Perdre du personnel là-dessus, c’est complètement délirant. » Interrogée, l’AP-HP confirme espérer que « les effectifs perdus d’avant la crise sanitaire [soient] reconstitués d’ici début 2026 ».