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Du concept de « fracture(s) numérique(s) » à celui de capital numérique ?

louisderrac.com · 7 min

Selon qu’on ait un capital culturel plus ou moins élevé, on va diversifier ses usages culturels du numérique et accéder à des usages dits « savants ». Consommer différents genres musicaux, des documentaires, des films d’auteur, plusieurs sites de presse nationale… Mais également produire, contribuer davantage.

Selon qu’on ait un capital social plus ou moins élevé, on va développer des réseaux sociaux différemment hétérogènes et de types plus ou moins variés (professionnels sur LinkedIn, amicaux sur Facebook ou Instagram, voire des réseaux « exclusifs » comme GensDeConfiance).

Le capital économique jouera également, d’abord sur les choix de l’équipement. Smartphone ou ordinateur, niveau de gamme de matériel choisi. Ensuite sur l’accès à des services payants (Cloud sécurisé, Netflix, sites d’informations payants) vs des services gratuits (Youtube, sites d’informations gratuits), soumis aux dérives du modèle économique de la publicité.

Par ailleurs, le capital numérique, à la manière des autres formes de capitaux, va se transmettre et s’hériter. Il parait assez naturel que des parents disposant d’un fort capital numérique transmettent (consciemment ou inconsciemment) ce capital à leurs enfants. Comme pour le capital culturel, il s’agira alors d’une transmission sous une forme objectivée, avec des biens numériques proprement configurés et maintenus (ordinateur fixe, appareils numériques variés, connexion internet à très haut débit), et une forme incorporée, donc une aisance d’usage des différents biens numériques, la capacité à s’en servir.

Cela semble d’autant plus certain que le capital numérique, bien plus que le capital culturel, est bien identifié aujourd’hui comme étant essentiel à une bonne insertion dans la société. Que ce soit pour comprendre les nombreux enjeux citoyens que pose notre écosystème numérique ou plus simplement pour se positionner avantageusement sur le marché du travail.

Le capital numérique intègre l’idée d’un réservoir qu’il faut alimenter, quasiment continuellement, pour éviter qu’il ne se vide. Cette idée me semble être tout à fait pertinente quand on voit la vitesse à laquelle les technologies numériques transforment notre société, notre droit, nos habitudes. Pour pouvoir suivre, il faut entretenir sa veille.

Le capital numérique intègre enfin l’idée d’une transmission, d’un héritage. Ainsi le capital numérique ne vient pas de nulle part, il s’acquiert en partie dans un processus de reproduction sociale.

Mais surtout, la notion de capital numérique évite les termes d’inclusion/exclusion. Il faut bien admettre qu’on peut faire le choix de ne pas développer de capital numérique, parce qu’on n’en voit pas l’intérêt, qu’on ne développe pas d’appétence numérique. Et il faudra bien finir par accepter que tous les citoyens ne sont pas intéressés par les technologies numériques, n’en déplaise à certains politiques ou champions de la tech.